humilité des soirs
Ca commence au son d’une guitare
Tout commence ainsi toujours
Une guitare que l’on gratte
Au couchant d’un soir en été
Quelque chose est charnel et sucré dans le ciel
Quelque chose est orange et turquoise
Il n’y a pas de mots
On ne parle jamais quand le ciel se défait
Les femmes ramènent leurs cheveux
C’est un geste On n’y pense pas
D’artiste ou de modèle
On peut boire ou fumer
Doucement
L’alcool a ses douceurs
Quand le ciel se défunt
En écoutant des fois
Des oiseaux qui décrient
Pour garder l’horizon dans la mire du temps
On se surprend aveugle
Il n’empêche qu’on peut
On peut se regarder
Quand le ciel se destin
le don de l'éphémère
Nous qui fûmes si doux
On nous disait d’azur
A peine si parfois
S’endéchiraient nos cœurs
Nous qui fûmes brûlants
On nous disait de braise
Inépuisés volcans d’un pays sans exil
Mais tant va l’eau dans la cruche
Un peu beaucoup et trop pour que
Ne déborde le vase
Nos vies C’est drôle nos vies
C’est comme du coton qu’on effiloche
Des peluches d’enfant qu’on a mâchées longtemps
Ou bien du vent juste du vent
Léger léger On dirait bien que ce n’est rien Nos vies
Pourtant la poussière à la poussière s’unit
Et ça finit par se savoir et se bâtir
Et les châteaux des fois
Ne sont ce qu’ils devraient
Cent fois la fourmi roule et pousse devant elle
Le morceau de sucre roux qu’elle trouva le matin
Cent fois c’est en vain mais qu’importe
Le but était l’effort et non la réussite
Va t’en savoir ce qu’il restera de Noël
Et des jours de plaisir
Les eaux de la mémoire cascadent si souvent
On dirait que d’écume les souvenirs se parent
Et c’est souvent la blessure
Dont se fige l’image
Plus tard Plus tard seulement
L’araignée de durer déroulera sa toile
Et c’est tout un art
les cicatrices du froid
Nous eûmes des hivers
Comme on a mal au cœur
Des façons de samba
Pour en rêver debout
Et comme argile en mains
Des nostalgies amères
Combien donc voulez-vous
Qu’il nous reste d’aurores
Parfois pourtant je sais
L’odeur des lilas sans qu’il pleuve
C’est que s’est posée sur ma peau
La main de l’amante
Ou le baiser de l’ami
Nous eûmes des hivers
A ne savoir qu’en faire
Et puis des peurs aussi
Mais c’est de bonne guerre
Nos âges se souvenaient de nous
Comme s’il était question
De patienter un temps
On croirait ainsi des fois
Que dans l’âtre le feu précéda l’étincelle
Ou bien la lune est déjà blanche
Que le jour n’a pas encore
Décidé de mourir
Nous eûmes des hivers
On ne saurait le dire
De grands flandrins d’hivers
Bleus comme on se pend
Et blancs comme on s’oublie
J’en ai parfois encore
Des frissons de rechutes
Des accès de froidures
Car le temps seul guérit la terre où vécut l’ouragan
Et s’il nous fallait croire
Au courage des corbeaux
C’est que vivre est un diamant
Que l’on taille sans fin
Va-t-en savoir si le défaut
N’en est pas quelquefois la plus belle facette
la magie de vouloir
Ce qu’il faut de forêt
Pour l’espoir d’un seul chêne
Tout ce qu’il faut d’azur
Pour attendre l’oiseau
Et ce qu’on cherche en chemin à mesure qu’on marche
Ce n’est pas comprendre
Non Ce n’est pas comprendre
On se comprend si peu
Et si souvent trop tard
C’est seulement vouloir
Lorsqu’il faudrait unir
L’envie du combattant
La prudence du loup
Et la peur des glaïeuls
Et que nous sommes là
Voyageurs immobiles
Incompétents muets
Sans justement savoir
Ce qu’il faut de forêt
Ou ce qu’il faut d’azur
Vouloir
Comme on se retourne
Et qu’il est déjà tard
L’heure avancée du feu dans les cheminées tristes
Vouloir toucher du sable et manquer la marée
L’heure enfin de coucher
Le grand corps de nos rêves
Et ce brouillon de cœur qui palpite d’amour
Vouloir c’est l’univers infiniment ouvert
A tous vents toutes envies
Toutes façons de faire
Vouloir c’est le désert d’où renaît l’orchidée